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Site archéologique des Fontaines Salées
Route de Pierre Perthuis, 89450 Saint-Père


Lorsque l’on évoque le néolithique en Europe de l’Ouest, les menhirs ou les dolmens (comme le tumulus de Dissignac) viennent généralement tout de suite à l’esprit, car les autres constructions, la plupart réalisées en torchis, ont disparu. Il existe cependant quelques autre témoins rares de cette période, dont plusieurs puits en chêne vieux d’environ 44 siècles à côté de Vézelay. Leur conservation est due aux propriétés de l’eau chargée en sel et en gaz rares dans laquelle ils baignent toujours.

Un puits de captage d'eau minérale

Le cuvelage du puits se compose d’un tronc de chêne évidé

Ces sources s’expliquent par la rencontre de deux failles dans le sous-sol, permettant la remontée d’eaux profondes, qui traversent des argiles salées avant d’arriver à la surface à divers endroits sous la forme d’une eau minérale légèrement salée avec des dégagements gazeux intermittents. Ces derniers ont sûrement permis aux hommes de repérer les sources qui devaient être en partie masquées par les eaux de la Cure voisine. Afin de les isoler de l’eau douce et de pouvoir les exploiter, ceux-ci ont aménagés des puits à leur emplacement, grâce à la mise en place d’un cuvelage constitué d’un segment de tronc de chêne évidé. Haut d’environ un mètre, et d’un segment intérieur d’environ 80cm, ces tubes formaient un bassin étanchéifié à l’aide de d’argile et de mousse. Afin d’en faciliter l’accès, le puits était aménagé avec six planches rayonnant autour de celui-ci, et un trou de poteau carré à proximité laisse penser à l’installation de balancier pour y puiser l’eau. Datés de la fin du néolithique, ces puits servaient à l’alimentation des hommes et des animaux, mais étaient également pour l’extraction du sel par évaporation à l’aide de bûchers.

Un puits de captage d'eau minérale

Les propriétés de l’eau minérale a permis de conserver jusqu’à l’écorce des troncs qui ont permis une datation précise de leur abattage au printemps 2238 avant J.-C. pour certains.

Certains puits ont été utilisés pendant presque 1500 ans. Les lieux sont ensuite probablement utilisés comme site cultuel par les celtes, avant les premiers aménagements réalisés sous la domination romaine au Ier siècle. Le sanctuaire, de taille modeste, se compose alors de thermes et d’un lieu de culte. Ce dernier s’est sûrement développé autour d’un point de captage d’eau salée, comme en atteste le bassin au centre de l’aire sacrée circulaire, d’une surface de 34m² et entourée d’une galerie couverte. Les thermes, situés au nord/ouest, s’inscrivent dans un carré de 54m de côté. La bonne conservation des vestiges permet une bonne interprétation du plan: Ainsi, l’utilisateur pouvait allé faire ses besoins dans les latrines, avant de commencer par se déshabiller dans un apodyterium (vestiaire. Ici de plan circulaire et chauffé par un hypocauste). Une fois nu, celui-ci  passait dans le tepidarium (salle tiède), puis le laconicum (étuve sèche), avant de finir dans les deux piscines d’eau chaude du caldarium. L’édifice était complété par les zones de services et par une palestre (grande cour entourée d’un portique, où l’on pouvait faire de l’exercice). Si ces thermes présentent le schéma classique des édifices thermales de cette période, nous pouvons toutefois noter l’absence du frigidarium (salle froide).

Un puits à côté d'un bassin rectangulaire

Au Ier siècle, un lieu de culte gallo-romain a été aménagé autour d’un des puits. Celui-ci se composait d’un bassin au milieu d’une aire sacrée circulaire fermée par une galerie couverte. Il était accompagné d’un édifice thermal.

Le bassin rectangulaire

Le bassin rectangulaire du sanctuaire du Ier siècle (à proximité d’un puits en haut, à droite). Le fond et la margelle sont en dalles de grand appareil.

Au IIe ou IIIe siècle, l’ensemble est agrandi. Ainsi des pièces sont rajoutées entre les thermes et le lieu de culte circulaire, en empiétant sur ce dernier et la palestre. Un deuxième sanctuaire est construit autour d’une autre source. De plan rectangulaire, il se compose d’un grand vestibule donnant accès une galerie ouverte par une colonnade sur un vaste espace. Celui-ci, probablement un grand bassin dallé, est encaissé dans versant et alimenté en eau douce. Il comporte un plus petit captant l’eau salée

Apodyterium des thermes

Les thermes étaient associés aux lieux de culte gallo-romain (permettant de purifier le corps en même temps que l’esprit). Ceux-ci, datant du Ier siècle, ont ensuite été agrandis. Sur la photo, on distingue l’apodyterium (vestiaire) au premier plan, et la palestre (cour pour faire de l’exercice) à droite.

Le christianisation de la Gaule et les invasions barbares entraineront l’abandon du site comme sanctuaire au IVe siècle. Les locaux ont continué à utiliser le site pour y puiser de l’eau et y récupérer le sel après l’avoir fait évaporer. L’instauration de la gabelle (taxe sur le sel) au milieu du XIVe siècle entraina de nombreux conflits, ainsi les sources furent remblayées trois siècles plus tard. Le site va ensuite peu à peu disparaitre sous les remblais, pour ne rester que dans la mémoire collective locale sous le nom des « Fontaines Salées ». Suite à la découverte de matériel antique au début du XXe siècle, et à des prospections sur le site, le professeur René Louis pense avoir identifié le site de la légendaire bataille de Vaubouton. Les campagnes se succèderont ensuite de 1934 à 1965, pour mettre au jour le site actuel.

Site des Fontaines Salées

Vue de l’ensemble du site des Fontaines Salées, avec l’ensemble thermal à gauche et le site cultuel à droite. Aujourd’hui, 19 puits datant du néolithique ont été retrouvés sur l’ensemble du site.

Les puits seront découverts sous les fondations romaines lors des fouilles en 1942, et leur excellent état de conservation (l’écorce est encore présente) a permis de dater précisément l’abattage de l’arbre. (Celui composant le puits n°9, qui a été étudié, a par exemple était abattu au printemps 2238 avant J.-C.). La bonne visibilité et compréhension des aménagements gallo-romains en font un site exceptionnel pour la compréhension des lieux de culte gallo-romains, en plus de puits réalisés à la fin du néolithique, période marquée par la sédentarisation des hommes.

 


 

Pour rester dans la période du néolithique, voir l’article sur le tumulus de Dissignac, dont on a longtemps cru que c’était une colline.

Si vous préférez les thermes romains, je vous conseille d’aller voir l’article sur ceux d’Entrammes, dont plus de neuf mètres de murs en élévation sont visibles dans la nef d’une église.

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