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Les trésors insoupçonnés de l’ancien palais épiscopal de Die

Chapelle Saint-Nicolas dans l’ancien palais épiscopal
Place de l’Évêché, 26150 Die


 

Die, petite ville de la Drôme, est située dans les contreforts des Alpes et offre un patrimoine insoupçonnée. Si la porte Saint-Marcel, vestige du rempart gallo-romain construit au IIIème siècle est probablement le monument le plus connu de la cité avec la cathédrale, la ville a le mérite de conserver un patrimoine datant d’époques variées mais pas toujours visible. On peut citer la cathédrale dont les parties les plus anciennes datent du XIème siècle, des hôtels particuliers du XVe au XVIIIe siècle, un salon chinois, témoin de la mode de l’orientalisme au XVIIIème siècle mais surtout l’ancien palais épiscopal, bâtiment commun de l’extérieur mais conservant une mosaïque du XIIème siècle relativement bien préservée et des papiers peints datant du XVIIème siècle, ce qui en fait un des exemples les plus vieux de France.
La chapelle Saint-Nicolas avec au sol une partie de la mosaïque dite des quatre fleuves et un papier peint XVIIIe au fond

La chapelle Saint-Nicolas avec au sol une partie de la mosaïque dite des quatre fleuves et un papier peint XVIIIe au fond

Chef lieu de cité du peuple des Voconces dans la province romaine de la Narbonnaise, la ville devient naturellement le siège d’un évêché au IVème siècle. La réunion de celle-ci avec l’évêché de Valence en 1276 puis sa suppression en 1801 entrainèrent la transformation du palais épiscopal en bâtiment municipal. Installé le long des remparts, une chapelle dédiée à saint Nicolas et réservée à l’usage personnel de l’évêque avait été aménagée dans une des tours de celui-ci au XIIème siècle. La chapelle, de plan rectangulaire d’environ 5,3 sur 6,7m,  occupait tout un niveau et son chœur dont seul l’ouverture est aujourd’hui conservée, était décalée par rapport à l’axe de la pièce afin de laisser un accès aux remparts. La majorité de la surface du sol est toujours occupée par une mosaïque datant de son aménagement qui faisait office de tapis d’autel.
Le chœur de l'ancienne chapelle (emplacement de la porte actuel) n'était pas dans l'axe de la pièce pour permettre l'accès aux remparts (ouverture à moitié bouchée à droite).

Le chœur de l’ancienne chapelle (emplacement de la porte actuel) n’était pas dans l’axe de la pièce pour permettre l’accès aux remparts (ouverture à moitié bouchée à droite).

La mosaïque des quatre fleuves servait de tapis d'autel et a été probablement réalisée avec des fragments de décor antique.

La mosaïque des quatre fleuves servait de tapis d’autel et a été probablement réalisée avec des fragments de décor antique.

Constituée de tesselles de marbres et de pierre provenant de régions éloignées donc provenant sûrement du décor des monuments antiques, elle représente symboliquement l’univers mais est communément appelée la mosaïque des quatre fleuves. Riche en symboles représentant entre autre les quatre éléments, elle est occupée en son centre par un médaillon duquel part les quatre fleuves du paradis terrestre qui vont se jeter dans l’océan symbolisé par des vagues ou frises ondulantes sur trois coins. Au centre du médaillon de forme circulaire, se trouve une étoile à huit branches qui pourrait être l’étoile polaire, entourée de motifs géométriques mélangeant plusieurs couleurs dont douze ronds de porphyre vert représentant probablement les signes du zodiaque ou les mois de l’année. Le tout est fermé par deux cercles noires encadrant les noms des quatre fleuves irriguant le jardin d’Eden: l’Eufrates (l’Euphrate), le Tigris (le Tigre), la Fison (Pishon dans la bible) et le Geon (Gihon dans la bible).
Si les deux premiers existent encore physiquement, les deux derniers n’ont pas pu être localisés. Sous les noms des cours d’eau, des têtes d’animaux humanisés, symbolisant probablement la source, et dont l’apparence est individualisée, crachent des filets d’eau qui finissent tous au nombre de trois, à l’exception du Pishon dont un quatrième bras irrigue une végétation abondante et directement un arbre (celui de la vie éternelle?). Les autre fleuves sont également associés à un environnement: ainsi le Gihon est bordé par des végétaux (marins?) et des vagues dans lesquels ont été représentés des poissons; Les eaux de l’Euphrate entourent une sirène et sont bordées d’animaux terriens; tandis que le Tigre est bordé par une faune aquatique mais va se perdre directement dans la bordure et une rosace d’angle. La faune représentée mélange aussi bien des animaux connus (poissons, écrevisses, chien, oiseaux) que fantastiques (griffons, ours ou chien à longue queue).
Le décor se complète avec 17 motifs dans des rosaces pouvant symboliser des astres ou les 17 pierres précieuses parsemées dans le jardin d’Eden. On peut également retrouver la symbolisation des quatre éléments dans la mosaïque: l’eau (les fleuves, la mer et la faune aquatique), la terre (les animaux terrestres), le vent (deux têtes soufflant situées dans des angles) et le feu (l’étoile polaire au centre de la composition). Enfin, plusieurs outils ont été représentés: une clef, probablement celle du paradis, un couteau et des ciseaux pour la tonte des moutons, qui peuvent être volontiers associés au sacrifice d’Abraham.
Au centre du médaillon, une étoile à huit branches (étoile polaire?), à son extrémité le nom des quatre fleuves du paradis

Au centre du médaillon, une étoile à huit branches (étoile polaire?), à son extrémité le nom des quatre fleuves du paradis

Le papier peint réalisé et posé au XVIIIe siècle est toujours sur les murs d'origine

Le papier peint réalisé et posé au XVIIIe siècle est toujours sur les murs d’origine

L’autre trésor de cette pièce sont des papiers peints réalisés au début du XVIIIème siècle et toujours sur leurs murs d’origine depuis. Peint à la gouache et réalisé au pochoir, ils ont été réalisés sur mesure et en plusieurs parties, qui ont ensuite été directement assemblées et fixées sur le mur. Le style du décor est difficilement identifiable même si on y retrouve des influences baroques, classiques et orientales dans un mélange de motifs floraux, d’éléments architecturaux, de médaillons avec des Putti (angelots) ou encore des sphinx. Si la composition générale se calque sur la forme du mur support, on peut remarquer sur le papier peint du fond, qui est également le plus grand, une volonté de rappeler le mur opposé en représentant les contours de l’ouverture du chœur. Ce dernier papier peint couvrant l’ensemble du mur où était situé l’accès primitif à la chapelle, le volume du chœur (accès actuel) avait probablement déjà disparu lors de la pose de celui-ci.
Le papier peint a été réalisé en plusieurs parties assemblées sur place.

Le papier peint a été réalisé en plusieurs parties assemblées sur place.

Ces deux décors architecturaux, réalisés avec environ six siècles d’écart ont pour point commun leur état de conservation exceptionnel due en partie à l’utilisation des locaux comme lieu de stockage mais surtout à leur position toujours sur leur lieu d’origine.

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